Combien même le Liban n’est pas seul quant aux divergences électorales, puisque, en Europe, la Belgique a également connu plus de 2 ans pour trouver un consensus politique entre belges et wallons, le cas du Liban est hélas spécifique.
Un pays dont la coexistence communautaire et religieuse était exemplaire, se trouve tiraillé , non pas du fait unique de ses politiciens, mais et surtout par les intervenants étrangers qui entravent sa souveraineté.
Ce florissant Liban a succombé depuis 1975, à la tyrannie meurtrière d’Israel d’abord, suivi de l’immixtion de la Syrie voisine et pour finir en tenaille entre d’une part, l’hégémonisme régional de l’Arabie Saoudite et son pseudo ennemi l’Iran.
Parmi les derniers chantages, les enturbannés de l’Arabie n’ont t’ils pas trouvés mieux que de constituer un coalition de vautours en quête de pétro-dollars pour faire inscrire le Hasbollah ( seule puissance militaire, bien que milice) sur la liste internationale du terrorisme et retirer, par la même, l’aide de quelque milliards de dollars qu’ils avaient promis au Liban pour son réarmement.
Edito – Massine Tacir
Triste anniversaire pour le Liban
Depuis le départ de Michel Sleiman en 2014, le Liban n’a plus de Président de la République. Photo Présidence de la République Libanaise.
LIBAN. Le Liban n’a plus de Président depuis deux ans. Le boycott par des députés des votes concernant son élection bloque le système. Des élus dont la légitimité apparaît douteuse car le Parlement, qui aurait dû être renouvelé en 2013, s’est autoproclamé. Aucune des 38 cessions de vote organisées pour élire un Président du Liban n’a atteint le quorum (86 députés sur 128) nécessaire.
À l’occasion de ce triste anniversaire, le Premier ministre libanais, Tammam Salam constate que « le Liban est un État en faillite sur le plan constitutionnel ». Il demande l’organisation d’élections parlementaires.
Le Liban reste depuis deux ans bloqué dans une impasse en raison de la répartition des fonctions institutionnelles par communautés. Le Premier ministre ne peut être que sunnite, le président du parlement chiite et le président de la République chrétien maronite. Sur le terrain, les « familles » clans ( Nasrallah, Berri, Aoun, Joumblatt, Hariri…) cherchent avant tout à préserver leurs intérêts e ceux de leurs donateurs étrangers, empêchant ainsi toute évolution, toute réforme et générant une corruption illustrée par le scandale des ordures.
L’Iran et l’Arabie saoudite en arrière plan
Ce jeu du « je te tiens par la barbichette » conduit le pays à vivre sous perfusion financière de « pays amis » qui tentent d’instrumentaliser le Liban. Les partis politiques disposent de moyens financiers importants, mais l’Etat n’arrive pas à payer régulièrement ses fonctionnaires, y compris son armée qui ne peut qu’assister aux luttes d’influence des différentes factions.
La situation politique au Liban peut actuellement se résumer à l’affrontement entre les anti Bachar al Assad qui rassemble les maronites (Forces Libanaises et Phalanges chrétiennes) et les sunnites (Courant du Futur, Saad Hariri). Ils sont activement soutenus par l’Arabie saoudite. Et face à eux les pro Barchar al Assad réunis sous le fanion de Michel Aoun et du Hezbollah chiite. Avec pour tirer les ficelles l’Iran. Ce sont ces derniers qui boycottent le Parlement au moment de désigner un président de la République. Chacun des deux camps veut porter un des siens à la présidence, devenue un enjeu important dans la guerre froide que se livrent l’Iran et l’Arabie saoudite. Beaucoup d’observateurs estiment que tant que les chiites et les sunnites n’auront pas scellé un pacte régional, la vacance présidentielle libanaise restera un moyen de pression.
Une 40ème séance du Parlement va tenter d’élire un président de la République le 2 juin 2016. Le résultat semble connu d’avance.
C’est cette souveraineté du peuple qu’il faut hisser de plus en plus pour souligner le vrai choix démocratique citoyen.
Après OBAMA, ce noir américain qui accède à la présidence Américaine, voila qu’un SADIK KHAN, Pakistanné d’origine et MUSULMAN de confession qui « s’accapare » la magistrature de LONDRES, la ville Anglaise au 9.000.000 d’âmes.
C’est dire que le citoyen, rassasié des dogmes politiques des uns et des menaces xénophobes des autres, a fait son choix serein, sur la base de l’ équité citoyenne simplement.
Un exemple à méditer, car cela vaut la peine, race ou religion n’a jamais était un obstacle à la compétence quelque soit le domaine.
Massine Tacir
Ce que révèle l’élection de Sadiq Khan à la mairie de Londres
FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN – Sadiq Khan, candidat travailliste à la mairie de Londres, est devenu le premier maire musulman d’une grande capitale occidentale. Essayiste française, Laetitia Strauch-Bonnart habite à Londres. Elle décrypte les raisons d’une victoire très symbolique.
Laetitia Strauch-Bonart a été chercheuse dans un think tank français. Elle vit à Londres où elle prépare un PhD en histoire sur les penseurs conservateurs et les questions morales après 1945. Vous avez dit conservateur? est son premier essai.
Sadiq Khan, candidat travailliste à la mairie de Londres est devenu le premier maire musulman d’une grande capitale occidental. Cela est-il un symbole important en Grande-Bretagne?
Laetitia Strauch Bonnart: Cette victoire reflète le profond changement démographique qui s’est opéré en Grande-Bretagne et surtout à Londres depuis les dernières décennies, puisque les musulmans représentent aujourd’hui 12,4% de la population de la capitale, une proportion qui croît d’ailleurs bien plus vite que celle des autres communautés.
Cependant, le fait même de se concentrer sur l’identité religieuse de Khan pose problème: c’est réduire la politique à une «politique d’identités», où l’origine et l’appartenance comptent davantage que les programmes politiques. C’est aussi penser que les électeurs se déterminent en fonction de ces identités, alors que la victoire de Khan a certainement d’autres facteurs, à commencer par la faiblesse de son principal opposant conservateur, Zac Goldsmith. En réalité, dans les derniers mois, la focalisation du débat électoral sur les questions d’origine, voulue ou non, a empêché d’évoquer les vraies questions importantes pour la ville, à commencer par l’immobilier et le manque criant de logements pour une population en constante croissante. Aucun des candidats principaux, que ce soit Khan ou Goldsmith, n’a proposé le semblant d’une solution crédible à ce sujet!
Sadiq Khan est le fils d’un conducteur de bus pakistanais. Ses origines culturelles et sa religion ont-elles joué un rôle dans cette élection? Lequel?
En effet, elles ont joué un rôle, même s’il reste difficile à quantifier. Il est impossible de ne pas être sensible à l’histoire de Khan, qu’on partage ou non ses idées: fils d’un conducteur de bus pakistanais, il a grandi dans une council house (un HLM) et fait son chemin dans l’école d’Etat, gratuite, jusqu’à devenir avocat spécialiste des droits de l’homme. Sa «success story» est exemplaire. Ensuite, la campagne de Khan a elle-même énormément mis l’accent non seulement sur son origine sociale, mais aussi religieuse. Ses prospectus ont parfaitement joué sur ce registre, et ont fait pleurer dans les chaumières comme il se doit. Et je dis cela sans condescendance: je suis la première, à la vue de ces prospectus, à avoir admiré le parcours et l’homme, et senti la force de la méritocratie à l’œuvre… On voit ici la puissance du storytelling moderne. En face de Khan, vous trouviez un conservateur, fils de milliardaire – les commentateurs sceptiques ne manquent pas de le rappeler dès qu’ils le peuvent -, formé à Eton, l’école privée la plus emblématique, arborant toujours le même costume bleu distingué, sa «classe» se lisant sur son visage et dans le moindre de ses gestes. Deux images du Royaume-Unis se sont opposées dans cette bataille, jusqu’à la caricature.
Sauf qu’on ne peut pas fonder son choix politique, à mon sens, sur ces seuls éléments. Or curieusement, l’origine semble avoir aujourd’hui un effet important sur les opinions des électeurs, et un effet en ciseaux: catalyseur de sympathie quand elle est modeste, elle est de plus en plus critiquée quand elle est aisée. Autrefois, l’appartenance à l’establishment aurait suffi pour faire élire Golsmith, et c’est une bonne chose que ce ne soit plus le cas, car en l’occurrence son programme n’était pas suffisamment solide. Cependant, ses origines ont clairement joué en sa défaveur, beaucoup lui reprochant simplement d’être fils de milliardaire. Pour plaire aujourd’hui, il vaut mieux un héritage de déshérité, une histoire personnelle faite de difficultés et d’ascension sociale. Qu’on trouve cela ridicule ou non, c’est l’esprit du temps, et Goldsmith n’est pas du bon côté!
Dans l’ensemble, cependant, les origines de Khan ont joué un rôle autant négatif que positif. Elles lui ont apporté du soutien et de la sympathie chez les électeurs et les médias de gauche ; dans le même temps, l’ «identitarisation» relative de cette élection a excédé beaucoup d’électeurs. De fait, le soupçon est toujours présent que la gauche joue trop sur les identités, et cela peut avoir des effets négatifs. Par exemple, une petite minorité, au sein du Labour, montre une certaine tolérance à l’égard de l’antisémitisme. Les récentes déclarations de Ken Livingstone, l’ancien maire de la ville, qui a fait de Hitler un sioniste, l’ont bien montré. Même si Khan a aussitôt condamné Livingstone, l’épisode a été dévastateur pour le Labour et a quelque peu nui à la campagne de Khan, d’autant qu’il y a dix ans, Khan et Livingstone avaient des opinions bien plus proches, notamment sur Israël. La politique identitaire est toujours à double tranchant.
Sadiq Khan a été accusé d’affinité avec les islamistes. Est-ce le cas? Ce soupçon a-t-il pu jouer en sa défaveur?
Il est très difficile de répondre à cette question. Les activités professionnelles de Khan – il était avocat spécialiste des droits de l’homme – l’ont, dit-il, mené à côtoyé des représentants de l’islam radical, voire à dialoguer avec eux lors de débats. Mais comment distinguer ses obligations professionnelles d’une possible tolérance indue?
On observe surtout un changement d’attitude depuis dix ans. En 2004, il a par exemple participé, en tant que candidat à la députation pour le Labour, à une conférence avec cinq extrémistes islamistes, organisée par Friends of Al-Aqsa, un groupe pro-palestinien qui a publié des travaux du révisionniste (selon les termes du Guardian) Paul Eisen. A cet événement, les femmes devaient emprunter une entrée distincte des hommes! La même année, président des affaires juridiques du Muslim Council of Britain, il a participé à la défense de l’intellectuel musulman Dr Yusuf Al-Qaradawi et nié le fait que celui-ci soit un extrémiste. Il est pourtant l’auteur d’un livre, The Lawful and Prohibited in Islam, où il justifie la violence domestique à l’égard des femmes et soutient les opérations martyres contre les Israéliens.
Cependant, pendant la campagne électorale, Khan n’a cessé de condamner l’extrémisme, et demandé la suspension de Livingstone après ses remarques antisémites. Il est aussi haï par certains radicaux car il soutient le mariage gay. Ce changement d’attitude est-il pure tactique ou est-il sincère? Inversement, sa supposée proximité ancienne avec certains radicaux était-elle sincère, où là encore tactique? Dans tous les cas, je ne crois pas que Khan cautionne l’extrémisme. En revanche, il représente une voix assez commune à gauche – surtout dans ce que j’appelle «la gauche du ressentiment» représentée par Corbyn, que Khan a d’ailleurs soutenu en septembre dernier pour son élection à la tête du Labour: celle qui consiste à expliquer les attitudes des extrémistes et des terroristes par la seule et unique faute de l’Occident. Ainsi en 2006, élu député, Khan était l’un des signataires d’une lettre au Guardian qui attribuait la responsabilité des attentats terroristes – comme celui du 7 juillet 2005 à Londres – à la politique étrangère britannique, notamment son soutient à Israël. Cette position et l’ambiguïté passée de Khan ont forcément créé un soupçon en sa défaveur.
Londres est-elle la ville du multiculturalisme heureux?
Oui et non! Tout dépend ce que vous entendez par multiculturalisme. Si vous pensez à la diversité des nationalités représentées à Londres, il y a en effet quelque chose d’admirable dans cette ville et sa capacité à faire vivre ensemble des personnes d’origines différentes.
Mais quand on parle multiculturalisme en Europe aujourd’hui, on le prend dans un sens plus politisé, celui de la complexe relation entre la population d’origine, chrétienne ou athée à coloration chrétienne, et les populations plus ou moins récentes de confession musulmane. En Grande-Bretagne, en apparence, tout se passe bien. Les musulmans modérés sont tout à fait intégrés. Ce qui est assez problématique – comme dans d’autres villes européennes -, c’est l’existence de quartiers entiers où le séparatisme identitaire est visible. C’est le cas dans l’Est de London, notamment dans le borough de Tower Hamlets. 30% de la population y est musulmane, concentrée dans des council houses. En 2014, l’ancien maire, Lutfur Rahman, a été limogé après des soupçons de fraude et de favoritisme communautaire. A Tower Hamlets, beaucoup de femmes sont voilées de pied en cap, suivies de près par leurs maris. La difficulté qui en découle est à la fois anecdotique et majeure: vous ne pourriez pas, si vous en aviez envie, engager la conversation avec elles, car ce voile crée une barrière. Situation rare en France, elle est très fréquente ici. Et pourtant ce quartier abrite l’une des meilleures universités de Londres, Queen Mary University, qui brasse des étudiants du monde entier. Les populations se côtoient donc sans se parler, sans se connaître. Difficile d’y voir un multiculturalisme heureux – ni malheureux d’ailleurs: c’est bien plutôt un multiculturalisme de l’indifférence.
L’insécurité culturelle que traverse la France est-elle aussi une réalité en Grande-Bretagne?
Les Britanniques ne parleraient jamais, comme nous le faisons, d’ «insécurité culturelle». A mon sens, l’insécurité culturelle à la française vient autant du sentiment d’une menace extérieure que d’une perte de confiance dans notre propre modèle. Les Britanniques, malgré la présence de cette «gauche du ressentiment», sont moins enclins au dénigrement de soi. Ensuite, leur interprétation des faits diverge de la nôtre. Beaucoup de Britanniques ne voient aucun mal à la séparation que je viens de vous décrire – pour eux, il s’agit simplement de l’expression de la volonté de certains musulmans attachés à leurs traditions. Tant qu’ils respectent la loi, pourquoi leur en vouloir? Pendant longtemps, la mise en garde vis-à-vis d’une supposée trop faible intégration des musulmans est restée l’apanage des conservateurs britanniques les plus traditionalistes.
Le multiculturalisme commence cependant à perdre de son lustre. Deux séries d’affaires retentissantes, depuis 2014, ont bouleversé le pays: d’abord celle du «Trojan Horse» en 2014 et 2015, où furent découvertes des tentatives concertées de mettre en œuvre, dans plusieurs écoles de Birmingham, une philosophie et des pratiques islamistes ou salafistes.
Pire, on a mis a jour dans les dernières années de nombreux cas d’abus sexuels sur mineurs, perpétrés par des «gangs» dont les membres étaient d’origine musulmane. Ce fut le cas à Rotherham entre 1997 and 2013, où 1400 jeunes filles ont été violées. Cinq hommes d’origine Pakistanaise ont été condamnés. On a découvert des horreurs similaires à Rochdale, Derby et Telford. Le cas le plus récent est celui d’Oxford, où un groupe de sept hommes, entre 2006 et 2012, a exploité sexuellement 300 mineures, avec une violence parfois épouvantable.
La multiplicité des cas est frappante. Surtout, tous les membres des gangs étaient à chaque fois d’origine musulmane, et les jeunes filles – âgées parfois de 12 ans – blanches. C’est pourquoi depuis 2014, date où les premiers rapports officiels ont été publiés, on s’interroge sur une éventuelle motivation ethnique des agresseurs. Par ailleurs, dans de nombreux cas, on a constaté que la police et les conseils locaux avaient tardé à prendre au sérieux les plaintes des victimes, quand ils ne leur riaient pas tout simplement au nez. Aujourd’hui, les autorités émettent sérieusement l’hypothèse que cette timidité et ce déni pourraient provenir de la crainte de la police et des conseils locaux de se voir, à l’époque, accusés de racisme. Ces épisodes sont absolument dramatiques, et en même temps, ils sont peut-être le début d’une prise de conscience salutaire que la tolérance multiculturelle s’est muée, dans certains cas, en aveuglement.
L’adage qui consiste à dire « En politique, tous les coups sont permis » nous le confirme encore une fois avec la candidature de Tramp !
Traiter de guignole au début de sa compagne, le voilà finissant quasi candidat des républicains et donc magistralement conforté dans sa candidature présidentielle !
Edito – Yakaledire
Primaires
Après l’abandon de Cruz, Trump «candidat républicain présumé» à la présidentielle
Le retrait surprise de Ted Cruz, qu’il a largement devancé mardi soir dans la primaire de l’Indiana, laisse la voie libre au milliardaire chez les républicains. Côté démocrates, Hillary Clinton est freinée par sa défaite face à Bernie Sanders.
Après l’abandon de Cruz, Trump «candidat républicain présumé» à la présidentielle
Donald Trump triomphe, Hillary Clinton trébuche. Et les électeurs américains, de gauche comme de droite, expriment une rébellion de plus en plus ouverte contre ceux qui les dirigent depuis des décennies à Washington. La primaire de l’Indiana, mardi, marque indéniablement un tournant dans la campagne pour la présidentielle de 2016. La voie est libre pour le magnat de l’immobilier qui, avec 53,7% des voix, écrase Ted Cruz, son principal rival dans la course à l’investiture.
Dans ce fief républicain conservateur et religieux, le milliardaire se paye le luxe d’arriver avec près de 17 points devant Cruz, le candidat de la droite religieuse et conservatrice. Le retrait surprise dans la soirée de ce dernier permet à l’ancienne star de télé-réalité de faire campagne avec le statut de «candidat républicain présumé à la présidentielle».
Une dynamique renforcée, coté démocrate, par la contre-performance d’Hillary Clinton dans cet état du Midwest où Bernie Sanders remporte 53% des voix. Pas de quoi compromettre l’avance de l’ex-secrétaire d’Etat en nombre de délégués, mais un frein certain pour sa campagne. Visiblement désarçonnée, Hillary Clinton a été la seule à ne pas s’exprimer mardi soir. Ce qui n’a pas échappé à Donald Trump. «Nous allons désormais combattre Hillary Clinton, elle ne sera pas une grande, une bonne présidente mais une mauvaise présidente. Elle ne comprend rien au commerce», a-t-il trompeté depuis la Trump Tower, son QG new-yorkais.
Dans un discours somme toute relativement calme et présidentiel, et emprunt d’une grande habileté stratégique, il s’est ensuite attaché à rassembler son camp. «J’ai rivalisé toute mon existence, en participant à des compétitions dans le sport, le business et, depuis dix mois, dans la politique. Ted Cruz, je ne sais pas s’il m’apprécie ou non, mais c’est un sacré compétiteur. Il est dur, déterminé», a salué le désormais candidat présumé du GOP (grand old party, le parti républicain) se gonflant d’avoir terrassé un tel rival. Une demi-heure plus tôt, Cruz n’avait même pas prononcé son nom dans un long discours prononcé d’Indianapolis et dégoulinant de religiosité béate: «Nos droits ne viennent pas des rois, des reines ou même des présidents, mais de Dieu tout-puissant !» avait-il rappelé, avant de rendre un hommage aux qualités de visionnaire de Ronald Reagan. Et de concéder sa défaite.
«Menteur pathologique»
«J’avais dit que je continuerais aussi longtemps qu’un chemin vers la victoire existait, a finalement lâché le Texan parmi les cris d’une toute petite foule de supporteurs. Il semble que ce chemin s’achève. Ensemble, nous avons tout donné sur le terrain dans l’Indiana. Mais, ce soir, à mon grand regret, les électeurs ont choisi une autre voie. Nous suspendons notre campagne, mais pas notre combat pour la liberté.» Pas un mot de soutien pour Trump donc. Il faut croire que l’hypocrisie a des limites, même pour un chrétien : quelques heures avant le vote, Ted Cruz s’est lâché comme jamais devant les journalistes, rapporte le New York Times, traitant Trump de «menteur pathologique», de «coureur de jupons» et«profondément amoral».
Visiblement même les républicains purs et durs de l’Indiana ont plus adhéré au discours volontariste et protectionniste en matière d’emploi et d’économie de Trump qu’aux saillies fondamentalistes de Cruz qui a fini sa campagne en accusant Trump (et Clinton) d’être pour que les personnes transgenres puissent choisir d’aller dans les toilettes des femmes, au risque de les maltraiter !
«Big», «Very big», «Historique». Mardi, dès l’annonce des premiers résultats de la primaire dans l’Indiana, les commentateurs faisaient assaut de superlatifs pour décrire la victoire de Trump. Selon les estimations, il totalisait 53,2% des voix, contre 36,7% pour Ted Cruz et moins de 7,5% pour John Kasich au profil plus modéré. Rien ne semblait plus pouvoir arrêter la dynamique du candidat au toupet politique et capillaire phénoménal. Avec 1 013 délégués, Trump se rapproche du chiffre magique de 1 237 délégués nécessaires pour éviter une Convention républicaine où il pouvait voir sa nomination contestée au second tour du vote des délégués, en juillet, à Cleveland.
Si l’on croit les sondages actuels dans les Etats où auront lieu les prochaines primaires, avec la dynamique politique qui est la sienne, l’affaire paraît pliée pour Trump. Il semble que l’équipe de campagne de Cruz, plus inspirée par les maths que par Dieu, a fait les mêmes calculs. Cruz n’a pas réussi à se poser en alternative à Trump dans l’électorat républicain. Avec ses 154 délégués John Kasich, le gouverneur de l’Ohio au profil plus rassembleur et modéré, reste le seul en piste au cas où Trump échouerait de justesse à passer la barre, hypothèse désormais hautement improbable.
«Winter is coming»
Ce mercredi matin, l’Europe se réveille donc avec Donald Trump en candidat républicain présumé outre-Atlantique. Lui que beaucoup considéraient, il y a seulement quelques mois, comme un clown. Le voilà qui se révèle un très sérieux opposant à Hillary Clinton, forcée de boiter jusqu’à sa propre investiture par la dynamique de Sanders. Les commentateurs pointaient mardi soir, le moteur commun alimentant ces deux victoires : l’un comme l’autre ont su capter le rejet et la frustration profonde des électeurs américains des «Washingtoniens» qui se succèdent aux manettes du pays.
C’est justement parce qu’il n’a aucune expérience politique ni jamais exercé un mandat d’élu au service du public que de nombreux électeurs votent Trump. Qu’il soit en passe de remporter l’investiture républicaine est une première depuis la candidature de Dwight D. Eisenhower. Encore que ce dernier «était un général cinq étoiles, commandant en chef des armées alliées en Europe pendant la Seconde Guerre mondiale», s’étranglait mardi soir le New York Times. Il fallait aussi voir la mine déconfite de David Axelrod, l’ancien chef de la stratégie des deux campagnes victorieuses d’Obama, reconnaître sur CNN qu’il s’est trompé sur Trump : «J’ai cru qu’il serait une passade de l’été, puis de l’automne. Puis qu’il ne passerait pas Noël.»
L’autre raison du succès de Trump, qui a particulièrement joué dans l’Indiana, est son discours protectionniste et volontariste en matière d’économie. Quand il dit «Make America great again», les électeurs entendent «les Américains d’abord». Et pas seulement les républicains, la classe moyenne blanche. Conscient de la puissance de cet argument, l’intéressé est d’ailleurs bien décidé à s’en servir pour grignoter l’avance d’Hillary Clinton dans l’électorat noir et latino. Son principal handicap, avec l’abstention dans son propre camp. «Les Hispaniques veulent du travail, les Afro-Américains veulent du travail. On va faire revenir le travail et faire en sorte qu’ils restent chez nous», a promis Donald Trump en conclusion, en promoteur du rêve américain. «Winter is coming», ironisait mardi soir un commentateur à la télé américaine, en reprenant le slogan de la série Game of Thrones, le rire jaune au-dessus de sa cravate.